Changer de monde, changer de vie

Lundi 9 novembre, dès 14 heures, les premiers adhérents de l’UTL ont pu entrer dans la « salle » de conférences (virtuelle) où les accueillait Pierre Campion « venu » leur parler d’un certain Pierre Brindejont, natif de Saint-Père-Marc-en-Poulet, et de sa descendance.

Pierre Campion, agrégé de lettres classiques, auteur de nombreux ouvrages et articles, a formé des générations d’étudiants de classes préparatoires au lycée Chateaubriand à Rennes. Il y a aussi cofondé la revue Atala, une revue pluridisciplinaire autour des lettres et des sciences humaines et sociales, ouverte tant aux universitaires reconnus qu’aux jeunes chercheurs. En 2000, il a ouvert un site internet, À la littérature…, nourri des contributions de nombre d’auteurs, critiques, chercheurs, lecteurs dans le domaine de la littérature sous toutes ses formes et, beaucoup plus largement, des sciences humaines.

Très loin, en apparence, de ces domaines, le thème de son intervention du jour dont les héros, Pierre Brindejont, ses fils et petit-fils, auxquels il s’est intéressé au hasard d’une recherche généalogique, ont tous voulu « changer de monde, changer de vie » entre 1812 et 1956.

Le premier, né en 1812, a quitté Saint-Père pour New York où il arrive en 1841 avant de migrer au Mexique où, dix ans plus tard, il apparaît marié avec une jeune femme venue directement de France en 1830. Ils auront deux fils dont l’un meurt à 25 ans. Le couple reviendra en France, à Saint-Servan, un peu avant 1875, très grosse fortune faite. Le deuxième fils, Prosper Michel, venu et domicilié en France bien avant le retour de ses parents, épousera la troisième fille d’Offenbach en 1882. C’est le fils du couple, Jacques, journaliste et homme de lettres, qui réhabilitera son grand-père en organisant des récitals où il accompagnait au piano sa deuxième épouse chantant des airs d’opérette…

Le récit que Pierre Campion nous a livré de la vie de ces personnages n’est pas sans poser de questions sur la quête du généalogiste. Plus qu’une quête, nous dit-il, il s’agit d’une véritable enquête policière : les preuves que l’enquêteur doit trouver, ce sont essentiellement des documents écrits, archives familiales, archives municipales, registres paroissiaux, correspondance… Que le généalogiste débutant ne se décourage pas, des bases de données sont accessibles via internet qu’il s’agisse des documents municipaux numérisés transmis aux archives départementales ou des ressources proposées par des sites comme « geneanet » ou « ancestry ».

Reste cette question fondamentale : pourquoi enquêter ? Pour Pierre Campion, le travail du généalogiste a à voir avec la justice en tant que celle-ci vise à réparer l’injustice, en l’occurrence celle qui est faite aux disparus : le généalogiste est celui qui réclame que les disparus soient reconnus comme étant, un jour, apparus… C’est aussi celui qui cherche des réponses à la lumière de l’Histoire qu’il revisite à travers des parcours de vie singuliers. C’est encore celui qui sait que son enquête risque de ne pas répondre à toutes les interrogations : comment Pierre Brindejont a-t-il fait fortune ? qu’est-ce qui a pu pousser une toute jeune fille de 18 ans à émigrer au Mexique ? Mais, s’interroger n’est-ce pas, déjà, un début de reconnaissance ?

Et cette conférence n’est-elle pas, pour certains d’entre vous, une invitation à reconnaître vos ancêtres ?

Site de Pierre Campion : pierre.campion2.free.fr