La marche représente notre caractéristique d’espèce (Homo sapiens), la démarche est individuelle et propre à chacun d’entre nous. Cette spécificité d’espèce est le résultat d’une longue évolution (8 Ma) rendant compte d’une aptitude à un déplacement de faible coût énergétique associé à un développement encéphalique important. Les troubles de la marche, d’un grand intérêt clinique, sont d’autant plus fréquents que nous vieillissons (>35% après 70 ans). La connaissance des mouvements de la marche fait suite aux travaux de J E Marey (1830-1904), inventeur de la chronophotographie. La succession des événements porte le nom de « cycle de marche ». Sa description est spatiale, temporelle et fonctionnelle et ce dans les 3 plans de l’espace. L’observation clinique prend en référence cette connaissance du « cycle de marche » pour identifier de nombreuses situations pathologiques (par exemple la marche à petits pas de la maladie de Parkinson….). Les mécanismes de la marche impliquent des informateurs (vue, centre de l’équilibre et proprioception (perception du positionnement des différents segments corporels)), les centres de contrôle (cerveau et moelle épinière) et les exécutants (appareil locomoteur). Chacun de ces systèmes est évalué lors de l’examen clinique, des exercices de rééducation spécifiques en sont déduits. Le milieu du XXème siècle sera marqué par la révolution cognitive (science des mécanismes de la pensée (attention, mémoire de travail, fonctions exécutives…..)), dont on découvrira très rapidement le rôle majeur dans le contrôle de la marche, connu sous le nom d’interactions cognitivo-motrices. L’étude de ces interactions fait appel au paradigme de la double tâche qui consiste à analyser les modifications de la marche lors de la réalisation concomitante d’une tâche attentionnelle (par ex décomptage à haute voix). C’est ainsi qu’il est décrit un phénotype cognitif de la marche (diminution de la vitesse de marche et perte de régularité du pas). La marche, en ceci, est un biomarqueur des maladies neuro dégénératives, notamment pour les maladies de Parkinson et d’Alzheimer.
Dr Bernard Auvinet, rhumatologue